Après avoir célébré les Cendres, nous voici au premier dimanche de Carême. Le Carême n’est pas tant le temps de l’effort, de la privation et du manque. Nous ne sommes pas masochistes ! C’est Celui de la conversion, du retour à Dieu. Nous sommes conviés à lui laisser – enfin – de la place dans nos vies qui ne désemplissent pas. Quel sens allons-nous lui donner ? Faut-il courir, jusqu’à plus soif, entre toutes les initiatives proposées ici où là ? Peut-être pourrions-nous simplement prendre le temps de souffler durant cette montée vers Pâques. Il faut du souffle, lorsque l’on marche. Et celle que nous débutons nous conduira sur les hauteurs du Golgotha.
Le temps de l’alliance
Souvent, la peur du vide, de l’ennui nous saisit de manière vertigineuse. Mais le Seigneur est là, aussi, dans ces moments. Il ne cesse pas de nous inviter à entrer dans son alliance. Elle nous donne de nous souvenir que nous ne sommes jamais seuls. Il nous donne son Esprit pour porter au monde son amour et sa tendresse, comme nous invite le psaume de ce dimanche. Nous l’oublions si souvent, cette présence bienveillante qui nous invite à transformer le monde par toute notre vie. Notre baptême est le signe indélébile de cette alliance. Il marque notre engagement de rester auprès de Dieu, de lui consacrer notre vie pour la joie du monde. C’est ce que Pierre nous dit dans la seconde lecture.
Goûter le Salut de Dieu
Le Salut que nous offre le Seigneur n’est pas une sorte de totem nous rendant invincibles à toutes les puissances de mort qui habitent notre monde. Au contraire, il nous invite au combat, à demeurer ferme dans la foi, l’espérance et la charité, car nous ne sommes pas seuls. Dieu est là, au milieu de nous. Le premier dimanche de Carême, ce sont les tentations du Christ qui sont proposées à notre méditation.
Entrer dans l’expérience du Christ au désert
Cet Évangile nous permet de comprendre ’expérience du désert que Jésus a pu faire. Il a été confronté, sans nul doute, à l’expérience de la solitude, de la désolation. Mais, il ne s’est pas laissé emporter par ces moments difficiles. Il a toujours vécu dans la confiance, avec son Père, même lors du temps de sa Passion. L’Évangile de ce dimanche est bien connu et, même si Marc fait l’impasse sur le détail des tentations, nous les connaissons bien. Toutefois, ce qui est intéressant c’est le moment où cela se passe. Marc le situe juste après son baptême. Là, où il a été révélé l’Amour que Dieu lui porte et ce que cela implique.
Écouter la voix de Dieu
Jésus est le Fils de Dieu et nous sommes invités à l’écouter. Être attentif à sa voix, qui est celle du Père, c’est entrer dans le temps du décentrement. Le Christ ne vit pas pour lui-même, il n’est pas là pour assouvir une soif de puissance et de pouvoir. Il est là pour témoigner de l’Amour de son Père aux hommes et aux femmes de ce temps. Ce dessaisissement de sa propre vie le confronte aux tentations de toute-puissance que l’Ennemi de la nature humaine lui propose.
Une parole qui libère
Ce dernier ne souhaite pas que la Parole de Dieu soit écoutée. Cette dernière entraîne à l’altruisme, au pardon et à la construction de la Paix. C’est tout le contraire des propositions du diable. Il nous veut à son service à ses pieds pour dominer le monde. Le Christ, lui, nous veut au service du Père pour que nous soyons au service des uns des autres. C’est un chemin de libération, de transformation intérieure qui nous est proposé pour transformer le monde.
Se laisser convertir par le Christ
La finale de cet Évangile nous le fait bien sentir. Le temps n’est plus celui du combat mais de la conversion. Avec le Christ, nous sommes au désert, avec le Christ nous annonçons l’amour du Père. Où que nous soyons, quoi que nous fassions, nous sommes en compagnie de Jésus. Cette proximité exige que nous acceptions de nous laisser aimer. Avec Jésus, nous devons annoncer l’Évangile de l’Amour. Dans ce temps du Carême, Dieu vient nous convoquer à un cœur à cœur. Comme Jean, lors de la Cène, nous sommes invités à nous pencher sur le cœur du Christ pour l’entendre battre pour nous. De ce cœur miséricordieux nous pouvons trouver l’énergie nécessaire pour annoncer l’Évangile aux femmes et aux hommes de ce temps. Cette annonce doit se faire dans une charité discrète, dans une manifestation d’intérêt à chacun et à chacune.
Discerner dans la mission
Le Carême nous invite à une plus grande proximité avec le Christ pour que nous soyons plus proches de nos contemporains, en son nom. C’est la mission du Christ que nous servons, non la nôtre. Il y a là un véritable de risque de tentation si nous ne prenons pas le temps de discerner et de relire. Le diable se cache dans les détails, dit la sagesse populaire. Il peut, aussi, être dans ce qui paraît être nos réussites. Elles peuvent servir la gloire de Dieu, notre satisfaction personnelle du travail bien fait, mais si elles viennent de Dieu, elles ne doivent pas gonfler notre orgueil.
Revenir à la source
Pour nous prémunir de cette tentation, il nous faut sans cesse nous rappeler la nécessité de revenir vers Dieu. C’est l’appel qui nous a été fait lors de notre entrée dans le temps du Carême, mercredi. C’est Lui qui est l’auteur de la mission. Il nous revient de la vivre dans une profonde et intime communion. Il est cette source vive qui nous permet de ne pas nous dessécher dans les déserts de notre monde.
Alors, entrons joyeusement dans ce temps de conversion que nous propose l’Église. Ne laissons pas nos cœurs se revêtir de Cendres. Ils sont le réceptacle de l’amour de Dieu pour que nous en vivions et en rayonnions au milieu du monde. Que ce passage de l’antienne de communion de ce dimanche puisse habiter notre cœur et le tourner résolument vers la joie de Dieu, même et surtout au cœur des déserts et de nos tentations : « Apprends-nous à toujours avoir faim du Christ, seul pain vivant et vrai, et à vivre de toute parole qui sort de ta bouche ».
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