Ce 8e dimanche ordinaire nous place sous le signe de la vigilance et de la fraternité. Nous pouvons aussi en profiter pour savourer l’Alleluia que nous proclamons avant l’Évangile. Mercredi nous célébrerons les Cendres : entrée dans ce temps du Carême. Il est aussi un temps de vigilance où Dieu nous offre l’occasion d’une véritable conversion. Ce dimanche, les textes que nous contemplons nous invitent à vivre la fraternité dans la prudence et la vigilance.
Vivre la fraternité dans la vigilance
Oui, il faut toujours accueillir favorablement la proposition de l’autre, comme nous l’enseigne Ignace, mais ne pas l’absolutiser. Elle a du prix, mais n’est pas l’alpha et l’oméga. Notre fraternité, notre bienveillante vigilance à l’égard de l’autre doivent nous inviter à hiérarchiser ses propos. « Ne fais pas l’éloge de quelqu’un avant qu’il ait parlé, c’est alors qu’on pourra le juger », nous dit la première lecture. Ainsi, nous comprenons le poids de la parole. Même si elle est d’un frère, d’une personne de confiance, il nous faut tendre l’oreille pour vraiment comprendre ce qu’il veut nous dire. Cette vigilance de l’écoute est primordiale dans toute relation.
Entrer dans une parole de vie
Si ce que l’autre nous dit nous semble bon, juste et raisonnable, engageons-nous à sa suite. Mais si nous sentons qu’il veut nous conduire à la médisance, au mépris de la dignité de l’autre ou au service de sa propre gloire, changeons de chemin. Souvenons-nous de la manière dont les personnes venaient à Jésus. Ils avaient entendu parler de Lui, il faisait des miracles, passait en faisant le bien. Sa Parole était une parole de vie qui restaurait la personne rencontrée dans sa dignité. Nous avons donc à nous conduire de cette même manière dans nos relations. Ne cherchons pas à manipuler l’autre et nous laissé entraîner dans des relations perverses. Nous sommes les fils de la Lumière, héritiers du Christ. Nous avons donc à être tournés vers le respect et la dignité de la personne. Aussi, prenons garde aux paroles, aux promesses que nous prononçons. Elles doivent être du solide et servir la vérité du Christ.
Entrer dans la vigilance du cœur
L’actualité nous montre bien que certaines paroles prononcées sont vaines et puisque nous sommes en période électorale, souvenons-nous de cette boutade de Jacques Chirac : « Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent ». Toutefois, pour le disciple du Christ, la formule doit être : « Les promesses, les paroles comptent et engagent ». Elles doivent rayonner, révéler la tendresse et l’amour de Dieu pour chacun de nous. C’est bien ce que nous dit le psaume de ce 8e dimanche ordinaire. Il nous place davantage dans la louange que dans la méfiance. Ce qui ne veut pas dire que nous devons baisser la garde et accueillir la parole de l’autre sans condition. Mais, plutôt, que nous avons à exercer notre vigilance en étant plongés dans la miséricorde de Dieu. Lui nous accueille sans condition parce qu’il sonde les reins et les cœurs. Mais, nous ne sommes pas Dieu. Nous avons pourtant toujours tendance à nous prendre pour Lui et cela nous rend vulnérables. Confions-nous surtout à sa miséricorde, attachons-nous à nous laisser rejoindre par la tendresse de Dieu qui jaillit de son cœur. Là est la boussole qui peut guider notre vie et nous aider à exercer notre vigilance avec sagesse et raison.
Maitres et disciples
« Le disciple n’est pas au-dessus du maître ; mais une fois bien formé, chacun sera comme son maître », nous dit Jésus dans l’Évangile de ce 8e dimanche ordinaire. Nous connaissons aussi sa citation qui dit que nous n’avons qu’un seul père et qu’un seul maître : le Père. Ainsi, il n’y a pas de mainmise par le Père sur nous. Il en est de même pour ceux qui nous enseignent. Ils ne sont pas supérieurs et n’ont pas à mettre la main sur leurs disciples. Nous courrons ce risque dans nos relations quotidiennes.
La vigilance dans l’enseignement
Nous pouvons être fréquemment dans la position d’enseignement, de celui qui sait. Pour autant, souvenons-nous que ce savoir n’est pas un pouvoir, mais une grâce, un talent, qui permettent à un de nos frères, une de nos sœurs de grandir et d’acquérir une nouvelle compétence. Celui qui enseigne doit avoir la vigilance de l’humilité. Il doit montrer suffisamment de sagesse pour que son « disciple » ne soit pas dépendant de son savoir, mais ait soif d’apprendre aussi par lui-même. Le Christ est ce maître là. Dans son enseignement, il n’a pas pris une position de surplomb. Il s’est fait proche des autres, il est devenu ami de ses disciples pour qu’à leur tour ils deviennent amis des hommes et des femmes. C’est cette posture, ce sentiment d’amitié qu’il importe de rechercher dans nos relations humaines.
Le vrai pouvoir est le service
Le pouvoir que nous détenons, grand ou petit, est un service que nous rendons aux autres. Nous sommes au service de leur croissance avons à montrer leur montre que celui qui sait est avant tout une personne qui a appris d’un autre. Le Christ est Celui qui se reçoit du Père, qui fait sa volonté. Son chemin parmi nous est un parcours pédagogique pour nous montrer la densité de la tendresse, de la miséricorde, de la bonté du Père. L’enseignement du Christ va jusqu’à se donner par amour pour nous. Il assume la haine de certains de ses contemporains, jaloux de leur pouvoir politique ou religieux.
Rechercher l’humilité
Il peut nous arriver, nous aussi, d’avoir l’impression d’être menacés dans notre sphère de compétence. C’est une réaction normale. Mais, au lieu de nourrir notre cœur de récriminations, regardons plutôt comment cela peut nous faire grandir. L’autre a toujours quelque chose à nous apprendre, même là où nous nous sentons compétents. Recherchons l’humilité et non le pouvoir. Ou alors que ce pouvoir soit tourné davantage vers la soif d’aimer, de pardonner, de faire croître l’autre dans son chemin d’humanité. L’enseignement suprême du Christ tient en cette Eucharistie que nous célébrerons. Elle nous rappelle le sacrifice du Christ sur la croix et le don de sa vie pour nous.
Puisse cette alliance que le maître renouvelle sans cesse au cœur du monde habiter notre cœur et faire croître notre vigilance. Ainsi nous deviendrons des frères, des sœurs les uns pour les autres et pourrons servir davantage l’humanité souffrante.