Ce dimanche nous fêtons le saint sacrement, le Corps et le Sang du Christ auxquels nous sommes invités à communier. Célébrer le Corps et Sang du Christ c’est être associé à l’Alliance de la Sainte Trinité. Lorsque nous nous approchons du saint sacrement, nous rencontrons le Christ qui se donne, pour que, à notre tour, nous nous donnions les uns aux autres. L’offrande du Christ sur la Croix est le signe de l’Amour indicible de Dieu pour nous. Il nous montre la voie du plus grand amour, celui qui vient dépasser tous nos égoïsmes et ruptures d’alliance.
Le saint sacrement : source pour la vie du monde
Le Corps et le Sang du Christ que nous célébrons, c’est la vie même de Dieu qui est offerte en partage à la multitude des femmes et des hommes de ce temps. Dans son Eucharistie, Dieu se donne au monde. Il s’est offert pour toute l’humanité, pas à quelques-uns. Communier au saint sacrement, ce n’est pas prendre des points sur notre carte de fidélité de « bon » croyant, c’est prendre des forces à la source même de Dieu. Toutefois, soyons attentifs à ne pas le chosifier et à enfermer le Christ dans l’Eucharistie.
Rencontrer le Christ dans le saint sacrement
Dans le pain et le vin consacrés, nous rencontrons le Corps et le Sang du Christ vraiment, sacramentellement, mais il se donne aussi par Sa Parole et nos rencontres avec nos frères et sœurs en humanité. Faire l’impasse sur la Parole et la communion fraternelle, c’est comme louper des marches en descendant d’un escalier. Nous sautons des étapes qui sont, pourtant, nécessaires. C’est ce que l’Évangile de ce dimanche nous propose de comprendre. Comme au jeudi saint ce n’est pas l’institution de l’Eucharistie qui nous est présentée.
Offert pour la multitude
Ce dimanche du saint sacrement, c’est la multiplication des pains que nous méditons. C’est avec ce que les personnes venues rencontrer le Christ ont apporté que la foule est nourrie. Ainsi, vivre l’Eucharistie c’est accueillir notre quotidien pour l’offrir à Dieu. Il en fera une vivante offrande à la louange de sa Gloire. C’est aussi le sens de cette phrase issue de la première prière eucharistique : « Regarde ces offrandes avec amour et, dans ta bienveillance, accepte-les. Qu’elles soient portées par les mains de ton saint Ange en présence de ta gloire, sur ton autel céleste ». Nous offrons au Christ notre vie (et pas seulement notre argent lors de la quête), tout ce que nous vivons personnellement et collectivement et, en échange, il nous offre sa vie. Cette vie offerte est l’ouverture vers la plénitude de notre existence.
L’Eucharistie, force des fragiles
Le saint sacrement est la force des fragiles qui nous donne de continuer malgré une mer d’huile ou démontée notre route à la suite du Christ. Parfois nous nous égarons, nous oublions qu’Il est Celui qui donne de la substance à nos vies. Mais, Lui demeure sur le chemin. Il fait « avec » ce que nous sommes et ce que nous avons pour que nous en fassions davantage, non pour Lui, mais pour les femmes et les hommes de ce temps. L’incarnation du Christ se poursuit par nos vies, tout ce que nous sommes, tout ce que nous faisons.
Dieu vient nous conduire au cœur du monde
Cette présence au cœur du monde ne se fait pas de manière intrusive. Le Christ vient susurrer au creux de l’oreille de notre cœur pour que nous puissions vivre de sa vie au cœur du monde. Accueillir le corps et le sang du Christ au cœur de sa vie, c’est entendre le commandement du Christ aux disciples : « Donnez-leur vous-même à manger ». De même que le Christ se donne à nous, nous avons à nous donner aux autres, « en mémoire » de Lui. C’est ainsi que nous pourrons porter du fruit et que notre vie deviendra féconde. C’est une grâce que nous avons à demander et à accueillir. Nous avons besoin de l’Esprit pour dépasser les frontières de nos limites.
Vivre de la grâce baptismale
Recevoir le Corps et le Sang du Christ c’est aussi être le levain de l’espérance que Dieu a versé dans nos cœurs à notre baptême. Nous avons à être aux frontières de ce monde, témoins de la présence discrète de Dieu qui vient nourrir son peuple de sa Vie. Cette présence vient nourrir notre âme et conduire nos cœurs à la Paix et à la Joie sereine. Ce n’est pas une gageure, mais une certitude pour nous qui mettons notre foi, notre vie dans les mains de Dieu.
Porter la vie de Dieu au monde
Par notre communion au saint sacrement, nous devenons des porteurs de l’Alliance nouvelle et éternelle dans ce monde et dans ce temps. Nous parcourons les routes de nos vies, de nos villes, de ce temps avec pour seul étendard : « le Christ qui s’est fait obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix », comme nous le rappelle l’épître aux Philippiens.
Itinérance apostolique
Dans cette itinérance apostolique que peuvent représenter nos vies, nous pouvons être attentifs aux tables que nous fréquentons. Sont-elles toujours des lieux de communion, de compassion, où, par notre présence, nous sommes en capacité de « donner à manger à l’autre » au nom du Christ ? Prenons le temps de parcourir tous ces lieux de repas, tous ces moments de rencontres — même ceux contraints ou obligés. Comment peuvent-ils devenir des moments où nous recevons l’autre de manière à ce qu’il devienne une communion, fondation pour la vie de ce monde, pour la Paix entre les femmes et les hommes de ce temps ?
Du saint sacrement à l’audace d’une communion
Là est l’enjeu de notre communion régulière au saint sacrement, au Corps et au Sang du Christ. Il doit pouvoir nous donner l’audace de changer ce monde, collectivement, car nous devenons le Corps du Christ, son Église. Elle n’est pas un corps de mercenaires, mais de missionnaires, de femmes et d’hommes qui ont à cœur de vivre l’Évangile en plein monde. Ne nous précipitons pas trop pour mettre en avant notre maladresse, notre indignité, notre incapacité. C’est ensemble que nous pourrons bâtir un monde plus juste, plus fraternel au nom du Christ. Membre de son corps nous avons à faire germer, au cœur du monde, des semences d’amitié.
Une mission d’amitié
Notre mission, que nous tenons de Dieu, est de rendre notre terre fertile et pacifique. Pour cela, nous avons besoin de la force de l’Esprit pour qu’il nous aide à aplanir les collines, les montagnes qui nous handicapent et nous empêchent de nous lever pour annoncer au monde l’amour du Père, dans le Fils par l’Esprit.
Entendons-donc l’invitation que nous fait l’hymne de Vêpres de cette fête du saint sacrement : « Prenez son corps dès maintenant, Il vous convie à devenir eucharistie. Et vous verrez que Dieu vous prend, qu’il vous héberge dans sa vie et vous fait hommes de son sang. »