Nous entrons ce dimanche dans le dernier de l’année liturgique ; le dimanche où nous célébrons Notre Seigneur Jésus-Christ Roi de l’Univers. Nous avons de quoi être surpris par le nom d’une telle fête. Célébrer le Christ comme le Roi de l’Univers nous paraît antithétique au regard de sa vie donnée par amour. L’Évangile lu dimanche après dimanche nous permet de contempler le visage du Christ, un visage de miséricorde, attentif aux plus petits, enseignant que le chemin pour le suivre passe par le service. Alors, le « Roi de l’Univers » c’est un qualificatif qui est loin de lui ressembler. C’est d’autant plus vrai, lorsque nous lisons dans la première lecture qu’il est le « le
prince des rois de la terre ».
Pouvoir
Comment un prince terrestre pourrait bien être un « Roi de l’Univers » ? Et également lorsqu’il renvoie Pilate dans ses propres certitudes à propos de sa royauté. Nous comprenons donc sans mal que nos catégories humaines en termes de pouvoir, de règne sont mises à mal par Jésus. Cette fête vient une fois de plus nous interroger sur la manière dont nous souhaitons servir et bâtir le Royaume de Dieu. Est-ce à la manière de Pilate avec l’armée, la puissance et la force ou à la manière de Jésus qui déplace le pouvoir du « faire à l’être » ? La finale de l’Évangile de ce dimanche nous le dit bien « Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix ». Nous sommes tellement habitués à nous agiter pour faire notre devoir d’état que nous en oublions souvent notre filiation divine.
Par notre baptême, nous sommes configurés au Père et envoyés par le Fils grâce au don de l’Esprit, en mission au cœur de ce monde. Cette mission est d’annoncer la vérité qui nous vient du Père et dont l’Évangile nous donne une révélation concrète. La vérité du Père c’est le Fils ; don de Dieu par amour aux femmes et aux hommes de ce temps. Il nous faut donc appartenir au Père si nous voulons mettre devenir des disciples-missionnaires du Christ en nous mettant à son école et à son écoute. Cette invitation à suivre le Christ de plus près nous est faite de manière plus spécifique aujourd’hui alors que nous réfléchissons à sa Royauté. C’est en continu que le Christ s’adresse à chacun d’entre nous et nous dit « si tu veux, suis-moi », « si tu veux prends ma suite, marche derrière moi et deviens mon frère et le frère de chacun ».
Révolution
Voilà la révolution du christianisme à laquelle nous sommes appelés : vivre de la fraternité du Christ et par là partager son règne. Le règne de Dieu c’est apporter le feu de l’amour sur la terre, un feu qui brûle en nos cœurs et en même temps notre incapacité à aimer. C’est cela le pêché qui nous blesse et parfois nous empêche d’aller avec allégresse vers le Seigneur. Ce pêché que le Christ a pris avec lui sur la croix qui nous fait saisir que son amour réconcilie et transfigure nos manques d’amour. L’amour de Dieu est créateur. C’est le moteur premier de la création. Il nous a créé pour partager son amour et nous le savons bien l’amour se démultiplie s’il est partagé. Nous avons donc à prendre soin de cette création comme nous prenons soin de l’amour. Cet amour qui nous fait entrer dans une dépossession de nous-même, dans l’acceptation que l’autre n’est pas l’image que je me fais de lui. Aimer c’est reconnaître l’impératif de ne pas juger l’autre, de ne pas mettre la main sur lui. Il ne nous appartient pas et nous ne lui appartenons pas mais nous engageons à prendre soin de cet autre qui a du prix à nos yeux. Là est le trésor de celui qui est témoin de la vérité à la suite de Christ, à la suite de Celui qui a donné sa vie afin que nous l’ayons en plénitude, en abondance.
Demandons donc au Seigneur la grâce d’aimer davantage pour devenir jour après jour sa ressemblance et entrer avec dynamisme et enthousiasme dans son Royaume qui est déjà là et pas encore là.