Le dépouillement du carême


Méditations au coeur du monde / vendredi, février 16th, 2024
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Nous célébrons le premier dimanche de Carême. C’est le temps où l’Église nous demande de nous laisser rejoindre par la miséricorde de Dieu. Le Carême est une occasion pour entrer dans un certain dépouillement. La liturgie en est le signe avec la suspension du Gloire à Dieu et de l’Alléluia. Acclamations que nous retrouvons à Pâques.

Le dépouillement du Carême

Entrer dans ce dépouillement c’est tâcher d’alléger tout ce qui encombre notre cœur, notre tête pour se laisser rejoindre par la tendresse du Ressuscité. Le dépouillement que nous propose le Carême n’est pas de faire des efforts, des sacrifices, des privations pendant 40 jours.

L’essence du carême

Cette proposition consiste à essayer de contempler davantage le Christ aimant et agissant en plein monde. Les yeux de notre cœur doivent se centrer davantage sur l’amour de Dieu pour chacun de nous que sur notre agitation quotidienne. Aussi utile et nécessaire que soit notre quotidien, profitons du dépouillement du Carême pour nous recentrer sur le Seigneur. Laissons le cœur de Jésus rejoindre le nôtre pour qu’à travers nos frères et sœurs nous le servions, l’aimions et louions davantage.

Un dépouillement spirituel

Cette invitation au dépouillement spirituel est un appel à entrer d’une manière approfondie dans l’alliance que nous propose le Seigneur. Lors de notre baptême, nous confirmons notre désir de rejoindre le Christ. Nous souscrivons une « alliance nouvelle et éternelle » avec le Dieu trois fois saint. Se lier à Dieu ce n’est pas s’aliéner, perdre sa liberté. Au contraire, c’est se laisser entraîner par un amour qui me dépasse et me conduit à ce dépouillement essentiel pour servir l’humanité souffrante

Le Baptême : source de l’Amour de Dieu

Le baptême qui nous fait entrer dans la communauté des croyants, qui atteste notre filiation avec Dieu. Lors de ce premier sacrement de notre vie ecclésiale, nous (ou nos parents, parrain et marraine) répondons « oui » à l’invitation de Dieu. Il nous attend pour que nous prenions pleinement notre place dans son peuple.

Le dépouillement du désert

L’Évangile de ce 1er dimanche de Carême nous fait méditer l’entrée au désert de Jésus. Le désert est le lieu où il sera tenté. Nous connaissons bien ces tentations que Satan propose au Christ. Elles sont celles de la toute-puissance à la condition de se livrer à son pouvoir.

Les tentations du désert

Ces tentations nous conduisent à comprendre que la toute-puissance est la négation de la liberté de l’autre. Ce dépouillement auquel nous invite le Carême peut nous conduire à méditer sur cet écueil qui nous guette souvent. Quand les choses ne vont pas assez vite, ne vont pas dans mon sens, ne résonnent pas avec mon désir, je risque de vouloir prendre la main. Nous pouvons y voir un talent de leadership, mais surtout un désir de toute-puissance. C’est alors que nous avons à porter de nouveau notre regard sur Jésus.

Contempler l’action de Dieu

De quelle manière agit-il avec ses disciples, avec ceux qu’Il rencontre et guérit ? Est-il dans la toute-puissance ou dans la proposition ? À l’évidence, c’est davantage dans cette seconde attitude que le Christ se situe. C’est un signe que la « toute-puissance » que nous attribuons à Dieu est une mauvaise compréhension.

Le désert et les bêtes sauvages

Oui, Dieu est tout-puissant, mais c’est son amour qui l’est. C’est un amour qui libère, qui entraîne vers un horizon de responsabilité dans l’audace et l’inventivité. Cet horizon peut parfois ressembler au désert tel que nous le présente Marc dans l’Évangile.

Bêtes sauvages

Même si, dans la Bible, le désert est le lieu de la rencontre avec Dieu, comme l’est la montagne, les bêtes sauvages y demeurent. Nous pouvons nous demander qui sont, aujourd’hui, les bêtes sauvages qui rôdent autour de nous quand nous essayons de demeurer avec Dieu. Peut-être ne faut-il pas les chercher à l’extérieur de nous ? Bien sûr, il y a des créatures dangereuses pour la vie de l’homme, des personnes toxiques qui peuvent nous faire penser à des « bêtes sauvages ».

Évangéliser notre cœur

Mais, au creux de notre cœur, ne sommeille-t-il pas des sentiments, des manières de faire et de penser qui nous écartent de Dieu ? Ce sont là des lieux qu’il nous faut évangéliser. C’est-à-dire les confier à Dieu et le laisser les habiter, les inonder de sa lumière. Ces « bêtes sauvages » sont toutes ces occasions où nous voulons prendre le pouvoir. Lorsque nous les détectons, confions-nous à la miséricorde de Dieu en le laissant être pleinement ce qu’il est.

Servir le Royaume et sa justice

Demandons-lui de nous indiquer la manière la plus juste, la plus sereine, de nous en remettre à son Esprit. Il est Celui qui nous donne l’élan pour servir le Royaume de Dieu et sa justice. Entrer dans ce nécessaire dépouillement demande un long travail sur soi et une grande confiance dans le fol amour de Dieu.

Avec Dieu et nos frères et sœurs

N’oublions pas aussi que nous avons des frères et des sœurs sur notre chemin d’humanité et de sainteté. Ils peuvent aussi être le reflet de l’action de Dieu tout comme celui des « bêtes sauvages ». C’est donc avec un discernement éclairé que nous pouvons cheminer dans cet appel au dépouillement. Il y a une dialectique à mettre en place entre le dialogue avec Dieu et celui avec nos frères et sœurs en humanité. La relation que nous avons avec Dieu, aussi intime et personnelle qu’elle soit, ne doit pas négliger celle avec nos contemporains. C’est un axe de notre vie humaine et spirituelle que nous devons garder à l’esprit.

Découvrir les mystères de Dieu

D’ailleurs la prière d’ouverture de ce 1er dimanche de Carême nous conduit dans cette dynamique. Elle nous appelle à rechercher « l’intelligence du mystère de Dieu ». Il s’agit là vraiment de mieux percevoir l’appel au désert, au dépouillement, qui nous est proposé durant ce temps de Carême. Ce n’est pas un exercice pieux, une privation le temps de 40 jours et puis c’est fini.

Entendre battre le cœur de Jésus

C’est véritablement chercher comment mieux entrer en résonance avec le cœur de Jésus. Il est le résumé à la fois du mystère de l’incarnation et de celui de la mort et de la résurrection de Jésus. Cherchons donc humblement, patiemment, sereinement à voir et à entendre battre le cœur de Jésus. Nous y découvrirons la source vive qui nous conduira vers ce dépouillement pour revêtir davantage le Christ au long de nos jours.