Pentecôte : cinquante jours après Pâques, l’Esprit est conféré, en plénitude, aux disciples. La tradition catholique en fait la naissance de l’Église. C’est l’ouverture à l’universalité, à toutes langues, peuples et disciples. L’image connue directement tirée des Actes des Apôtres est ces langues de feu qui apparaissent au dessus des disciples reclus dans la chambre haute. Feu qui les brule pour aller porter au monde la Bonne Nouvelle reçue du Christ : Il est ressuscité, nous avec Lui, pour continuer à vaincre tout ce qui nuit à la dignité des hommes et des femmes de ce monde. Pour autant, cette force donnée et reçue à ceux qui la reconnaissent n’est pas non plus une formule magique mais un gage pour savourer le pain de la route devenu corps du Christ et supporter fatigues, contradictions et épreuves que nous rencontrons au fil de nos jours. Il s »agit pour nous de faire l’expérience d’Elie à l’Horeb. C’est l’ensemble du chapitre 19 du premier livre des Rois.Elie est envoyé annoncer la conversion à ses contemporains, mais subit beaucoup de revers, il se confronte à de nombreux prophètes de dieux païens et rencontre l’opposition vive de la reine Jézabel qui le menace de mort. Devant tant de pression, il fuit et trouve refuge sous un genêt. Là il rencontre un ange qui le réveille et l’invite à se nourrir (1 R 19, 8) pour continuer le chemin et s’en va à l’Horeb. Après une marche de 40 jours et de 40 nuits (!) il passe la nuit dans une caverne. Le Seigneur alors vient à sa rencontre pour savoir ce qu’Elie fait là. Il relit alors son expérience récente et confie son désespoir au Seigneur. Le Seigneur lui demande de sortir de sa caverne. Elie exécute cette consigne. C’est alors que se manifestent vent, tremblement de terre, feu mais point de présence du Seigneur dans tous ces cataclysmes. Il se manifeste dans le « commencement d’un murmure d’une fin de silence » puis envoie Élie poursuivre la mission qu’il lui a confiée.
Fuite
Cette expérience du prophète Élie peut, sans nul doute, rejoindre un peu de la nôtre. Il nous arrive, parfois, d’être fatigué, épuisé, perdu même parfois dans les tâches qui nous incombent. Tâches pour lesquelles nous mettons tout notre zèle, notre passion, notre dynamisme. Pourtant, cela patine. Nous ne voyons les effets de nos efforts et avons envie de tout laisser pour partir ailleurs. Alors nous fuyons mais la mission nous rattrape car elle nous habite. Cette mission n’est pas forcément parcourir les chemins pour annoncer le Règne de Dieu mais simplement faire notre travail quotidien, d’honnête femme/homme, notre devoir d’état (de vie) comme d’aucuns l’appellent.
Sortir
Alors, pour retrouver force et courage il nous faut apprendre à sortir sur le seuil, à affronter nos peurs pour les laisser passer puis découvrir avec une ouïe attentive, une vue aiguisée tous ces petits quelques choses, toutes ces brises légères, tous ces murmures de douceur, de vie, de paix qui traversent nos vies. Il faut nous habituer à l’extraordinaire de l’ordinaire. Ce qui a redonné goût à Élie, ce qui l’a relancé c’est ce doux murmure et non les gesticulations cataclysmiques. Dans nos vies, il nous apprend à discerner toutes ces voix/voies qui veulent nous entraîner du côté obscur de la force, tous ces prophètes de mauvaises augures qui veulent nous conduire à la désespérance, aux défis inaccessibles car irréalistes. Puis, se centrer sur nos voies/voix intérieures qui nous parlent d’enthousiasme, de dynamisme, de paix et qui nous mettent en marche même vers des buts qui nous paraissent inatteignables.
Signes
Là sont les signes de l’Esprit de Pentecôte dont nous faisons mémoire cinquante jours après Pâques, dix après l’Ascension. Les apôtres en font l’expérience car de la peur des persécutions ils sont passés, avec le don de l’Esprit, au courage, au zèle apostolique. Ils ont osé aller, aidés par l’Esprit, au-delà de leur propre nature, poussés par quelque chose, quelqu’un, plus exactement, dont la rencontre à changé radicalement leur vie. Nous aussi, appelés à devenir apôtres du Ressuscité, au cœur de nos vies, nous sommes invités à compter davantage sur le don de l’Esprit que sur nos propres forces. Nous sommes invités à accomplir notre vocation profonde, l’appel qui est constitutif de nos vies.
Faisons nous confiance en nous mettant résolument à l’écoute de tous ces Murmures au cœur de notre vie, ils sont subtiles, discrets, quasi imperceptibles. Ils viennent d’ailleurs, de la force de Dieu, de son Esprit qui – comme l’écrivait Pedro Arrupe en 1978 :
a transformé les faibles pêcheurs de Galilée en piliers de ton Église et en Apôtres qui ont offert leur vie en témoignage suprême de leur amour pour leurs frères.
Alors, sans hésitation, disposons largement nos cœurs et nos vies aux murmures qui nous sont donnés d’entendre. Ils sont comme un fil à broder sur l’aiguille de nous qui nous conduira, sans nul doute, avec patience et endurance, à faire de nos vies un chef d’œuvre, à devenir chaque jour davantage des hommes/femmes pour les autres.